700 milles de l’île de Guanaja (Honduras) à Panama, soit 5 jours en théorie. Mais le voyage en mer enseigne l’humilité et la patience. Nous ne battrons pavillon panaméen que 10 jours plus tard, soit le 3 janvier 2018.
Suivant le dicton bien connu, « qui regarde trop la météo reste au bistrot », on se décide à partir malgré un vent guère orienté de manière idéale. On espère qu’il tournera en notre faveur sur la route. Le 25 décembre, les amarres sont larguées à l’aurore.

L’annexe est hissée sur le pont, le régulateur d’allure prend sa place sur la jupe.
Cekankonvaou, est-ce que vous nous recevez ?
Nous prenons la mer avec le catamaran Cekankonvaou dont les deux mousses, Marin et Cyrus, ont 5 et 1 an. Voisins à la marina Manglar del Rio, au Guatemala, pendant 5 mois, nous avons eu l’occasion de les connaître. C’est sympa de naviguer côte à côte, de se donner des nouvelles à la VHF, de partager les points météo et plus rassurant aussi. Malheureusement, au 4e jour, plus de son, plus d’image. Nous ne les voyons même plus sur la carte marine. Pour filer incognito, nous avions convenu de ne pas allumer l’AIS, un système d’identification automatique qui permet de localiser un navire dans les alentours.

Cekankonvaou au mouillage devant l’île de Guanaja.
Plan Vigie Pirates
C’est en effet une navigation inédite que nous entamons. La côte atlantique du Honduras est réputée, à son extrême est, pour ses actes de piraterie. Le dernier date de novembre 2017. On prend donc l’affaire au sérieux. Pour ce faire, nous préparons une caissette avec des cartes bancaires périmées, diverses cartes de fidélité, des bijoux de pacotille clinquants et une centaine de dollars. Elle sera cédée au besoin quand les affaires auxquelles on tient vraiment sont planquées : i-pad, ordinateur, papiers du bateau, appareil photo et quelques billets. Jean-Marie va même jusqu’à retirer nos alliances.
Des bords carrés
L’idée, c’est de s’éloigner au maximum d’une zone de pêche, au large du Honduras. Pour ce faire, on vise le nord. Hélas, le vent de nord-nord-est est contre nous. S’enchaînent 5 jours de pré serré et une vingtaine de virements de bord. C’est un peu comme si, pour aller de Nîmes à Paris, vous visiez Lyon puis Poitiers, puis Strasbourg, puis Tours… Insensé. Non seulement, on ne va pas dans la bonne direction mais en plus on n’avance pas d’un cachou ! 60 milles par jour à peine quand Balanec avale normalement le double en 24 heures. Déprimant.
Dans ces conditions, le mal de mer nous saute dessus dès les premières heures de navigation. Au deuxième jour, les filles vont mieux. Je ne peux pas en dire autant. Tant que nous serons au pré, j’en serai quitte pour me tordre les boyaux. La houle de presque deux mètres, désordonnée, brutalise le voilier qui s’écrase lourdement et bruyamment dans le creux des vagues ; s’il n’était en aluminium, je craindrais qu’il ne se brise. Avec la gîte, les toilettes se vident dans la salle de bain. Répugnant. Nous voilà à la vieille école du seau. Jean-Marie gère l’appétit des filles du mieux qu’il peut avec des en-cas rapides : purée, compote, œufs durs, pain de mie, biscuits, yaourt… La plupart du temps, nous dormons tous les quatre dehors, dans le cockpit, les filles sanglées au bateau car l’intérieur est vraiment trop inconfortable. Au 6e jour, je déclare la douche et le changement de tenus obligatoires.
On finit par arriver à 250 milles des côtes, soit 450 kilomètres et ne voyons aucun navire. Ouf ! Mais vu tout ce que l’on a enduré, et bien que nous n’ayons pas entendu le moindre claudiquement d’une jambe de bois, je les maudits ces pirates ! Passée la zone à risque, nous capons vers le sud, longeant, très au large, le Nicaragua et le Costa Rica. La vie s’adoucit en même temps que le bateau reçoit le vent par le travers sur une mer assagie.

Leçon de cachalot.
Bonne pêche
On pêche deux daurades coryphènes et une bonite. Coline est aux anges, le repas sushi la fait déjà saliver. Et Erell, grande première, apprécie de manger des morceaux de thon cru dans une feuille de nori. Si les pirates nous ont laissé tranquilles, c’est un voilier qui nous attaque, par l’arrière. Mesurant bien deux mètres de long, le poisson magnifique a croqué notre hameçon. Jean-Marie bataille quelques minutes avec la bête qui a déroulé quelque cent mètres de lignes, faisant des bonds prodigieux. Craignant qu’il endommage notre régulateur d’allure en coinçant le fil dedans, Jean-Marie coupe sa ligne et repose son biceps tétanisé. Tant mieux ! C’est tellement beau de savoir ce splendide animal libre. Mieux vaut manger plusieurs poissons de taille moyenne, voire petits qu’un grand, non ? Pour l’équilibre de la chaîne alimentaire, mieux vaut préserver les gros spécimens ? qu’en dit mon frère biologiste ?

Daurade coryphène
Notre repas japonais fête l’entrée en 2018, avec une bouteille de cidre en guise de champagne familial. Le 3 janvier, après avoir croisé quantité de cargos, nous distinguons une masse sombre, puis une côte verdoyante et Puerto Belo nous souhaite la bienvenue au Panama.

Repas sushis
Bravo. Je pensais fort à vous pour ce trajet. Bonne année 2018, belles navigations et donc belles aventures à tous les quatre. Je vous embrasse. Joel
Envoyé de mon iPhone
>
J’aimeJ’aime
Très bel article ! Quel style! Alors que nous étions sans doute tous, bien au chaud dans nos pantoufles au coin d’un sapin de noel et d’un bon feu de cheminée, nous vous admirons pour votre courage et pour avoir affronté ces long jours de près. Entre le mal de mer et les pirates vous avez choisi la bonne option! Bravo pour votre courage ! Bises. Jerome
J’aimeJ’aime
Bonjour a vous 4 !
Bravo pour cette épreuve et sans doute superbe expérience! Sur les photos, Erell a vraiment grandi !
De notre cote, on était pépère a Green Island / Antigua. On est reste 13 jours = avec 12 jours de kite. J’ai bien progresse et Kelly est maintenant autonome. On est vraiment content de nos vacances. Cela nous a fait une telle coupure relaxante, a l’abri d’un rythme de travail très intense. A tel point qu’on a decide d’y retourner 9 jours pour les vacances de février..
Jean-Marie: j’ai investi dans un kite de 17 m2 (sinon, je n’aurais pas autant kite). Tu as pu t’y remettre? Ou bientôt?
SInon, je me suis renseigne sur Barbuda. C’est dramatique ce que le gouvernement essaie de faire, pour profiter de la catastrophe d’Irma, aligner les Barbudiens, et essayer d’y faire proposerai les tourists $. Cela te révolterait, Gaelle !
Ou en est Kirkiou? Ils vous retrouvent ?
On attend avec impatience les histories de la traversée du canal de Panama !
Bises Jerome
>
J’aimeJ’aime
👍…Nous vous suivons toujours avec plaisir, et découvrons grâce à vous des pays que nous n’aurons pas l’occasion de voir…! Vos yeux, vos sentiments, et vos émotions sont devenus les nôtres. Bravo…pour vos magnifiques partages. Tous nos meilleurs vœux à tous les quatre et heureuse continuation pour toute vos navigations. Pleins de bisous…! 😘😘😘😘
Envoyé de mon iPad
>
J’aimeJ’aime
Quel récit, quelle aventure ! Merci. Bises Manu
J’aimeJ’aime
Bonjour a tous et bonne année! Merci pour ces infos instructives et ce témoignage, je comprends la peur des pirates, on se dit qu’à priori ca va aller mais un doute subsiste toujours… Pour l’instant nous sommes encore en Guadeloupe et bientot Antigua! Bon vent a vous, vous croiserez peut etre des copains SOCA et leurs deux filles. Bises Les TAMATAI
J’aimeJ’aime
Où êtes vous? On a plus de nouvelles ☹️…. Vous avez passé le canal? Bises à vous quatre Joël
Envoyé de mon iPhone
>
J’aimeJ’aime