Petite sœur de La Havane, Trinidad donne cette même impression de décor de cinéma. Pourtant, aucune caméra derrière les portes en fer ouvragées ; les hommes et femmes, nonchalamment assis sur les marches de leurs splendides demeures, ne sont pas non plus des figurants. Les seuls qui détonnent, en définitive, c’est nous !
Enrichie grâce à la piraterie puis à la production sucrière, respectivement aux XVIIe et XVIIIe siècle, la ville connaît un profond déclin économique au cours du XIXe siècle. Oubliée du monde durant un bon siècle, elle expose aujourd’hui ses splendeurs passées, à savoir des palais somptueux et des résidences chargées d’histoire. Ce qui vaut à la cité d’être inscrite au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Au temps des colonies
Pour la visiter, rien de tel que d’y habiter. De fait, l’économie repose sur les nombreuses « casa particulares » (chambres chez l’habitant), manifestement le meilleur moyen d’entretenir ces fastueuses demeures coloniales. Aux mains des descendants des propriétaires eux-mêmes, celles-ci sont restaurées bon an mal an, agrandies, repeintes… Chacune s’ouvre sur un vestibule d’apparat où les antiquités voisinent avec des objets plus personnels. Ainsi, des photos de famille sont éclairées par des lustres en cristal ; des petits bijoux de verrerie s’alignent à côté d’une collection de coquilles d’escargots. Nos premiers pas dans ces entrées minutieusement agencées sont pleins d’étonnement. S’ensuit un long corridor et un enchevêtrement de pièces, et souvent un patio qui illumine ces intérieurs assez sombres. On va dormir dans un musée !
Aussi belle vue de haut
Nos hôtes sont des gens simples qui tiennent leur logement impeccable. Après nous avoir désigné notre chambre, ornée notamment d’un large miroir et de diverses babioles très jolies, ils nous invitent à découvrir les terrasses. C’est sans doute le deuxième attrait de ces demeures, après leur décoration historique. Ces petites terrasses, séparées par quelques marches ou un muret, forment des alcôves pour deux-trois tables. On nous y sert le dîner et le petit-déjeuner pendant que nous nous extasions de la vue sur la ville depuis les toits en tuile.
De la couleur !
Dans les ruelles pavées, pas une automobile en circulation, pas une affiche, pas un graffiti, pas une poubelle moche. L’accessoiriste de ce décor a pensé à tout. On déambule dans les rues jusqu’à atteindre la plaza Mayor autour de laquelle se pressent plusieurs palais qui abritent notamment le musée romantique. Nous visitons une galerie d’art réputée car Trinidad est aussi connue pour son école de peinture. De l’art enfin ! Car, des galeries, il y en a des dizaines. J’ai l’impression qu’en somme les maisons vivent soit de l’hébergement des touristes, soit de l’exposition de tableaux. Les styles sont très variées mais les thèmes, eux, manquent, comment dire ?, d’ouverture. Si l’on exclut les portraits, la grande majorité des œuvres racontent Cuba, ses Chevrolet, ses campagnes, ses figures célèbres, ses villes, ses danseurs de salsa… Est-ce la clientèle touristique qui est responsable de ce thème unique ou les Cubains ne dessinent-ils tout simplement que ce qu’ils connaissent ?
Quand le jour tombe, les bars s’animent et la musique jaillit. A la Casa de la Trova, on peut prendre des cours de salsa dans l’après-midi afin d’être, j’imagine, moins ridicule en soirée. Je regrette de n’avoir pas eu l’opportunité d’une telle leçon. Un professeur m’a toutefois fait danser sur la très fréquentée place de la Casa de la Musique : un bon moment !